Des créatrices à l’honneur

En septembre 2008, le Centre de la gravure et de l’image imprimée de la Louvière (Belgique) avait conçu une exposition consacrée à la création féminine actuelle. C’était avant que le Centre Pompidou ne présente “Elles”, accrochage de ses collections organisé autour des femmes artistes (jusqu’au 24 mai 2010). Aujourd’hui, les deux se font face, puisque l’exposition de la Louvière, “Cris et chuchotements”, est montrée au Centre Wallonie-Bruxelles, à Paris.

“Elles” est une opération de grande ampleur, bien moins exhaustive qu’elle ne le prétend, mais réalisée selon le principe de l’énumération. “Cris et chuchotements” a une tonalité, des préférences et une poétique propres, qui font d’elle une réussite rare. Vingt-trois artistes d’âges, de nationalités et de notoriétés variés. Des œuvres qui se répondent d’une artiste à l’autre et qui se réunissent autour de peu de motifs, le corps telle qu’une femme l’éprouve, la sexualité, la condition et l’imagerie féminines, la souffrance aussi.

Bien des noms sont attendus – Louise Bourgeois, Nancy Spero, Ana Mendieta, Annette Messager -, mais qu’on connaisse les travaux qui sont présentés ne leur enlève rien : à l’inverse, le plus évident est qu’ils traversent le temps avec l’aisance des grandes œuvres. Même expérience et même reconnaissance avec Kiki Smith : son autoportrait, sa planche de tatouages ou Puppet, photogravure et collages, sont simplement parfaits.

Le plus grand plaisir est qu’il en va de même d’artistes plus jeunes, moins connues, tout aussi bien présentées et convaincantes. Les sculptures de verre aux formes et aux couleurs d’organes de Laurence Dervaux, placées dès l’entrée, sont la première très bonne surprise. Viennent ensuite les gravures sidérantes d’Agathe May, aux dimensions du mur. Et encore les lithographies fantasques et grinçantes de Frédérique Loutz, les aquarelles burlesques jusqu’à la cruauté de Françoise Pétrovitch ou les étranges têtes animales de Myriam Hornard.

A peu de distance de là, “Histoire d’elles” réunit d’autres artistes féminines, peintres et dessinatrices. Christine Sefolosha, Lydie Arickx et Vanessa Fanuele s’y dinstinguent particulièrement.

Philippe Dagen

“Cris et chuchotements”, Centre Wallonie-Bruxelles, 127, rue Saint-Martin, Paris-4e. Tél. : 01-53-01-96-96. De 9 heures à 19 heures ; samedi et dimanche à partir de 11 heures. 3 €. Jusqu’au 6 septembre.
“Histoire d’elles”, galerie Polad-Hardouin, 86, rue Quincampoix, Paris-3e. Tél. : 01-42-71-05-29. Du mardi au samedi de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au 18 juillet.

Article paru dans l’édition du Monde du 21.06.09.